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Fiscal

Contrôle fiscal

L’administration fiscale doit établir la nature de la prestation imposable en BNC lors du rehaussement d'impôt

L’affaire de la vente fictive de tableaux flamands d’un ex-Ministre de l’Intérieur a fait l’objet d’un nouveau rebondissement.

Après avoir obtenu de l'autorité judiciaire communication d'informations relatives à un virement de 500 000 € effectué en 2008 sur le compte bancaire d’un ancien ministre, l'administration fiscale a fait usage du délai spécial de reprise de 10 ans (LPF art. L. 188 C) afin de rehausser son revenu imposable du montant de cette somme dans la catégorie des bénéfices non commerciaux (BNC).

Le contribuable a contesté le recours au délai spécial décennal ainsi que la qualification de revenu imposable. Ces arguments ont été balayés par le juge d’appel (CAA Paris 13 juillet 2022, n° 19PA03040). En revanche, devant le Conseil d’État, la qualification de revenu imposable a fait mouche.

Rappelons que dans l’affaire, les résultats de l’enquête pénale avaient établi que le montant de 500K€ perçu correspondait à la vente fictive de deux tableaux. Selon les juges du fond, l’administration fiscale devait être regardée comme établissant que la somme de 500 K€ avait été versée, non pas en contrepartie de la vente de tableaux, mais de la réalisation d'une prestation, susceptible de se renouveler, et dont la rémunération devait donc être regardée comme un revenu rattaché à la catégorie balai des BNC (CGI art. 92).

Le Conseil d’État a toutefois rappelé qu’il appartient à l'administration, lorsqu'elle entend fonder une imposition sur le fondement de l'article 92 précité, en dehors de toute procédure de taxation d'office, d'établir que les sommes réintégrées dans les bases imposables du contribuable constituent des revenus. Dans ce cadre, il incombe au juge de l'impôt d'apprécier si l'administration établit la nature de revenus des sommes en cause, compte tenu des éléments de preuve qu'elle présente et, le cas échéant, des éléments que lui soumet le contribuable qui soutient que les sommes en litige ne présentent pas la nature de revenus ou relèvent d'une autre catégorie d'imposition et de ceux que l'administration lui oppose alors en vue d'établir, par tout autre moyen complémentaire, le bien-fondé de l'imposition.

En jugeant comme établie la possibilité de la répétition ou de la réitération de l'activité ou de l'action à la source du gain litigieux, sans avoir ni décrit, ni qualifié la prestation en contrepartie de laquelle la somme aurait été versée, le Conseil d’État considère que le juge d’appel a insuffisamment motivé son arrêt et commis une erreur de droit. En conséquence, l’arrêt est annulé et renvoyé devant la cour administrative d’appel de Paris.

CE 25 octobre 2023, n° 467538